03/02/2008
Instantané de vie 28 - Le loup solitaire...
Bonjour papa, bonjour maman...
C'est la première fois que je vous écris une lettre. Une lettre que vous ne lirez jamais. D'ailleurs vous n'y comprendriez rien. Et vous ne le tenteriez même pas.
J'étais avec Elle au téléphone ce matin. Quand nous avons raccroché, j'ai eu l'impression qu'on m'arrachait le coeur. Je la connais depuis si peu de temps. Je ne l'ai vu qu'une seule fois. Elle me manque. C'est la première qui me comprenne. Elle me devine à chaque inflexion de voix. Elle a confiance en moi. CONFIANCE. Ce mot qui n'a jamais fait partie de votre dictionnaire.
Deux fois déjà, cette semaine, mes yeux sont soudain devenus humides. En écoutant une chanson, en regardant les frissons timides de l'air dans les branches des arbres. J'ai la sensation d'embrasser le monde quand Elle est là. C'est Elle. Je sais que c'est Elle. J'ai envie de connaître chaque millimètre de sa peau. J'ai envie de vivre à jamais au pays de son corps.
J'ai pris mon petit déjeuner ce matin, comme d'habitude, avec cette boule au creux de l'estomac. Sa voix chantait encore dans mon oreille, réveillait mes fièvres endormies. En même temps je regardais un petit bout de film. Un film qui date des années 30. Avec le Front Populaire en filigrane...
"César" de Pagnol. La fin de la trilogie de "Marius". Marius y découvre Césario, son fils de 20 ans. Ils se parlent pour la première fois. Ils se disent des mots d'amour... Je connais le film par coeur.
Et j'ai éclaté en sanglots. Impossible de me retenir. Je pleure encore en écrivant. Et je vous jure que c'est pour de vrai.
Les violoncelles déchirent le silence de mes nuits
Les violoncelles griffent mes lambeaux de souffrance
Les violoncelles mordent la chair de mon enfance
Les violoncelles percent mon coeur d'une nouvelle vie.
Papa, maman, je sais maintenant. Je manque de famille depuis que je suis né. Vous n'êtes que mes géniteurs.
Depuis un demi-siècle je me La cherche, Elle, sans le savoir, et puis Elle arrive, Elle débarque, Elle met les pieds dans le plat tout ébréché que je suis. Elle me dit des mots que je n'ai lu que dans les livres. J'ai envie besoin d'Elle.
Que m'arrive-t-il ce matin ? Elle met mes entrailles à nu. Elle fait le ménage de mes maux. Je l'aime à en hurler à la Lune, comme un vieux loup solitaire qui vient de retrouver sa meute. Je l'aime et ne lui ai pas encore dit. Je me retiens depuis plusieurs jours. Les mots me brûlent les lèvres. Je ne veux pas lui dire au téléphone. Demain, je lui dirai demain, en La regardant dans les yeux.
Il y en a qui se servent des "je t'aime" comme on se sert des "passe-moi le sel". Pas moi. Je ne dis pas "je t'aime" n'importe quand, ni à n'importe qui. Mais j'ai hâte à demain, ma gorge a mal de se retenir. Elle, mon Elle, je t'aime. Grâce à toi, je sais enfin où je vais, celà ne m'était jamais arrivé. Je t'appartiens.
Voilà papa, voilà maman, votre fils vient de naître. Il va commencer à vivre. Il va apprendre à marcher, à se tenir debout. Il sait enfin ce que veut dire "être deux". Je vous adresse cette lettre à titre posthume. J'ai brisé le cercle de l'errance et de l'humiliation. Et je vous plains, sincèrement...
Si le sel de la terre
Ne sert qu'à alimenter nos guerres
Quand est-il de l'Amour
Qui ne nous sert
Qu'à user de calembours ?
Fabrice. Le 03/01/2008
16:15 Publié dans Etats d'âmes | Lien permanent | Commentaires (5)
Commentaires
jolie note, très émouvante qui donne envie de pleurer et du bonheur à la fois.
maintenant tu es sorti de l'ombre, cours vers cette lumière qui t'appelle, cours vers ce bonheur qu'elle t'offre, cours vers elle!!...profite, et profite encore de tout ces sentations retrouvès...tout le reste est derrière toi maintenant!!!
bisous
Écrit par : melancoly | 03/02/2008
Melancoly : Oui Melancoly, je profite de chaque instant, de chaque mot qu'elle prononce, de chaque étincelle dans ses yeux espiègles... Et le passé, je le jette à la poubelle.
Bisou.
Écrit par : Fabrice | 06/02/2008
C'est beau ...
J'aime te sentir heureux.
Et je suis contente de ne m'être pas trompée
Tout arrive
Le reste, s'en foutre ....
Écrit par : Lucie | 06/02/2008
L'arrivée du soleil... il le fallait bien un jour !
Écrit par : rony | 09/02/2008
Lucie : Je vis un rêve éveillé ma Lucie. J'aime enfin. Et ce sera ma dernière. Je ne veux qu'Elle. Et je bosse depuis hier, après 4 ans d'hibernation. Je suis surveillant dans un collège, et j'adore ça.
Elle... J'ai envie de me l'apprendre par coeur... Et je me fous du reste...
Des milliers de bises...
Rony : Il était temps ! Je risque les coups de soleil, j'étais devenu bien pâle... Presque une ombre...
Écrit par : Fabrice | 12/02/2008
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